Qui est le bandit ? D’où vient-il ? Qu’est-ce qui a fait de lui ce hors-la-loi à la fois craint et admiré par ses contemporains ? Différences de classes, résistance au pouvoir, refus de sa condition sociale, soif de révolution, il y a autant d’hommes que de bandits. De cette époque Corso-génoise du début du XVIIe siecle jusqu’au milieu du XXe siècle, le musée de Bastia propose une plongée dans l’univers du banditisme corse et italien afin de mieux comprendre ses origines, ses mécanismes, son mode de vie, et son déclin progressif à travers plusieurs types de bandits : d’honneur, social, vengeur, fanatique et révolutionnaire, idéologique…
Montrer également le folklore du bandit à travers des identités ancrés dans la culture populaire, et son acculturation depuis qu’elle est romancée et que son image est réinterprétée par la société. L’histoire du bandit est alors réécrite par la classe dominante, relayé par l’art, jusqu’à devenir un être quasi mystique, empreint de surnaturel, de superstition.
Enfin, présenter le déclin du banditisme grace à une grande volonté politique de la France et de l’Italie jusqu’au début du XXe siècle où, loin d’avoir disparu, le banditisme amorcera sa transition vers de nouvelles formes de criminalité qui nécessitera une forte adaptation du pouvoir en place.
Présentation du parti pris graphique
Mettre à l’honneur une personnalité comme le bandit ou éventuellement le brigandage corso-italien sur la période allant du XVIIe siècle jusqu’au milieu du XXe siècle, c’est passer par une réinterprétation engendrée par l’inconscient collectif. Que le bandit soit au grand cœur, d’honneur, révolutionneur, vengeur ou simplement malhonnete par nature, il est avant tout une forte personnalité, qui doit être au centre du visuel, au premier plan.
Le traitement graphique, les inspirations
Que ce soit à cause de la période choisie, de la personnalité du sujet ou encore de notre connaissance des bandits par de très anciennes photographies en noir et blanc, notre référence collective nous oriente spontanément vers des affiches cinématographiques de western ou de peplum; un fond passé, souvent sépia, le personnage principal fier et héroïque au premier plan, éventuellement réinterprété à l’encre ou au fusain.
Le sujet
Plus intime qu’une scène générale de brigandage, le visuel devrait passer par l’individu lui-même, pas par le portrait d’un bandit en particulier mais par l’idée même du bandit, choisir un inconnu ou représenter un mélange du genre; Il devrait être présenté en position de réaliser son crime, juste avant qu’il agisse, la seconde qui précède le passage d’un homme honnête à celui de brigand, de hors-la-loi, et ainsi capturer notre crainte de l’inconnu, car la force quasi mystique du bandit n’est pas dans son acte, mais dans le fantasme de son acte. On peut retrouver cet effet dans de nombreuses affiches comme celle de Roger Kaste illustrant l’instant qui précède l’attaque d’un requin blanc (Jaws), comparaison hasardeuse mais d’une redoutable efficacité…
Idéalement, le bandit devrait se positionner de face, légèrement courbé, le fusil ou le pistolet pointé en avant, avançant lentement, prudemment et à l’affût, d’un pas feutré prêt à bondir sur le spectateur afin de le détrousser, et ainsi faire ressentir au contemplateur contemporain du visuel ce que l’imaginaire populaire a fait ressentir à la bonne société depuis toujours, un mélange de peur et de fascination…
Nous ne sommes plus là dans l’interprétation stricto sensus du thème principal de l’exposition qui vise d’abord à présenter les mécanismes ‘historiques’ du brigandage et du banditisme, mais il s’agit de créer une représentation fantasmée bien que proche de la représentation populaire du bandit, un visuel accrocheur et racoleur qui garantisse une bonne fréquentation de l’exposition.
» Il n’y a pas de meilleur gendarme que celui qui a été bandit. »
Emil Michel Cioran